1881

White Fathers’ Diary in Buganda

Diaire des Pères Blancs au Buganda

 

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janvierfévrier – mars – avrilmai – juin – juillet- août – septembredécembre

 

REDACTEURS : 

Diaires 1 & 2 : 01/01/1881-13/01/1881 : LIVINHAC  —   13/01-27/12/1881 : LOURDEL   —   27/12/1881-31/12/1881 : GIRAULT Δ

 

1881

 

Mutesa, avec son chien

 

 

Janvier 1881 – pp.211-213

Vendredi 21 janvier

Friday, January 21st
Lettre du P. Levesque à M. Pearson pour s’excuser de ne pouvoir lui rendre visite pour cause de maladie. Le père Livinhac en profite  pour offrir à M. Pearson quelques pièces de mirikani * étoffe de valeur, venant des Etats-Unis (?) au cas où ces messieurs n’auraient plus rien pour acheter la nourriture. M. Pearson répond qu’ils en ont assez pour attendre Monsieur Stokes. Letter from Fr. Levesque to Mr. Pearson apologizing for not being able to visit him due to illness. Father Livinhac took the opportunity to offer Mr. Pearson a few pieces of mirikani * expensive material in case these gentlemen had nothing left to buy food. Mr. Pearson replied that they had enough to wait for Mr. Stokes.

Dimanche 23 janvier

Sunday, January 23rd

Un mwami * chef administratif – à plusieurs niveaux : kyalo (county), ...  – plur. abaami qui vient de ramasser des pioches dans l’Usoga au nom de Kabaka, passe vis-à-vis notre bananeraie et nous envoie le bonjour.

Le roi a reçu.

Temps sombre, orage.

N’ayant pas en ce moment nos chrétiens à instruire, profitons pour catéchiser les enfants plus facilement. Il serait bon de voir ce que l’on pourrait tirer de ces petits Nègres. Jusqu’à présent, on n’a pas pu s’en occuper sérieusement à l’exception d’un seul : Léon, notre baptisé qui jusqu’à présent paraît bien profiter des soins donc il a été l’objet. Cet enfant qui, il y a 15 mois, était très timide et même un peu hébété, vous regardant avec de grands yeux, ne semblant ne rien comprendre à ce que vous vouliez lui faire faire, ayant assez d’un regard un peu sévère pour le rendre tout penaud, de sorte que même des Baganda l’appelaient musiru (idiot ou muet) à cause de sa timidité et de sa difficulté à parler, ce pauvre enfant est arrivé à apprendre tout le catéchisme kiganda aussi bien que le plus intelligent de nos néophytes, à comprendre les vérités de notre sainte religion d’une manière satisfaisante; à aimer le Bon Dieu et la Sainte Vierge aussi bien que les bons séminaristes de France. En quelques jours, le P. Levesque lui a appris les prières de la messe. Et actuellement il sert la messe. Inutile de dire qu’il donne le bon exemple aux autres enfants, commençant à comprendre le bien que nous voulons lui faire. Enfin, les qualités de l’intelligence et du cœur se sont développées en lui d’une manière telle que nous n’avons qu’à nous en réjouir. Obtiendrait-on les mêmes résultats avec les autres enfants s’ils étaient l’objet des mêmes soins? Je l’ignore. Tous les enfants ne sont pas tous doués des mêmes qualités ; mais s’il en devait être ainsi, n’aurions-nous pas plus tard de précieux aides surtout si nous pouvions obtenir un jour liberté complète d’enseigner dans les campagnes : l’avenir décidera. En attendant, je demande à tous ceux qui pourront lire ces lignes de ne pas croire à l’impossibilité de christianiser et d’éduquer convenablement les Nègres.  Comme quelques voyageurs se sont plu à le représenter, ne voyant en eux que des gens d’une race inférieure, le milieu entre le singe et l’homme. Et je supplie nos chrétiens d’Europe de nous aider dans la conversion des pauvres Noirs, et qu’ils soient bien persuadés que le Nègre, une fois touché par la grâce qui vient d’en Haut, est aussi bien accessible aux idées de la religion que les autres hommes. Il y a une différence à faire entre les Nègres de tel et tel pays de même qu’on fait des différences entre les Blancs de telle et telle contrée. Tels Nègres présentent plus de dispositions que tels autres. Ils diffèrent de goûts, d’aptitudes, et c’est à tort que l’on a voulu en faire une seule et même classe, déterminer une excellence, et les apprécier tous en général de la même façon d’après une seule et unique manière de voir. Ainsi dans trop de pays, le Nègre est anthropophage. Ici, dites à un mukopi * homme du peuple qui n’a pas encore eu de rapport avec les Blancs, qu’il y a des hommes qui mangent leurs semblables, il ne le croira pas. A moins qu’il ne soit étranger à toute idée d’anthropophagie et ils se laisseraient mourir de faim. Qu’il me soit permis de contredire ici monsieur Stanley qui représente les Baganda comme des rusés chenapans, voleurs et fourbes à l’excès, et Mutesa (le seul par qui l’Afrique centrale peut-être christianisée et civilisée) suffisant à peine par sa sévérité à les retenir dans de justes bornes. Ne pourrait-on pas dire au contraire que le peuple Muganda, loin d’être né avec le désir irrésistible de s’enrichir violemment par la rapine et le meurtre, est né avec le désir qui le pousse vers la religion et la civilisation. Mais qu’entravé dans ces bonnes dispositions, encouragé et poussé dans ses mauvais instincts, trouve dans le roi actuel au lieu d’un guide et d’un puissant excitant vers le bien, un obstacle et un obstacle presque insurmontable qui l’empêche de se christianiser et de se civiliser. Ce peuple a de nobles instincts qui ne demandent qu’à être bien dirigés. Si à ces rapines et ces guerres d’esclaves auxquelles tout le monde est forcé de prendre part plus ou moins, succédait le travail de la terre et l’enseignement de tout ce dont on peut tirer parti dans ce riche pays, l’amour des sciences et des arts, les Baganda abandonneraient volontiers leur vie de brigandage. Car les Baganda, malgré les quelques défauts qu’il faut leur reconnaître, possèdent des qualités que l’on ne trouve pas chez beaucoup d’autres Nègres. Le grand désir de connaître et d’apprendre, entre autres de s’instruire de la religion ferait de ce peuple bien gouverné le premier peuple de l’Afrique qui mériterait de prendre place au rang des nations chrétiennes et civilisées.

Monsieur Pearson conseille au P.Levesque, pour guérir son ongle incarné, de mettre le pied dans l’eau chaude, et de boire de l’eau avec bitartrate de potasse et de l’acide tartrique.

A mwami * administrative leader – at several levels: kyalo (county), ... – plur. abaami who just plundered tools in Usoga in the name of Kabaka, passes over to our banana plantation and sends us greetings.

The king held an audience.

Dark weather, thunderstorm.

Not having at this moment our Christians to instruct, let us take advantage to catechize the children more easily. It would be nice to see what we could get out of these little niggers. Until now, we have not been able to take serious care of them except for one: Leon, our baptized who until now seems to benefit from the care he was given. This child who, 15 months ago, was very shy and even a little dazed, looking at you with big eyes, seeming to understand nothing at all about what you wanted him to do, having enough of a stern look to make him crestfallen, so that even the Baganda called him musiru (idiot or mute) because of his shyness and his difficulty in speaking, this poor child came to learn all the Kiganda catechism as well as the most intelligent of our neophytes, to understand the truths of our holy religion satisfactorily; to love God and the Blessed Virgin as well as the good seminarians of France. In a few days, Fr. Levesque taught him the prayers of the Mass. And currently he serves the Mass. Needless to say, he is setting a good example for other children, beginning to understand the good we want to do him. Finally, the qualities of the intelligence and the heart have developed in him in such a way that we can only rejoice. Would we get the same results with other children if they were treated the same way? I don’t know. Not all children are endowed with the same qualities; but if it were to be so, would we not later have precious help, especially if we could one day obtain complete freedom to teach in the countryside? The future will decide. In the meantime, I ask everyone who may read these lines not to believe in the impossibility of Christianizing and properly educating the Negroes. As some travellers were pleased to represent them, seeing in them only people of an inferior race, un the middle between monkey and man. And I implore our Christians in Europe to help us in the conversion of the poor Blacks, and let them be well convinced that the Negro, once touched by the grace that comes from on High, is as accessible to the ideas of religion as other men. There is a difference to be made between the Negroes of such and such a country, just as there are differences between the Whites of such and such a country. Such Negroes have more dispositions than such others. They differ in taste, in ability, and it was wrong to make them one class, to determine one excellence, and to appreciate them all in general in the same way. So in too many countries, the Negro is anthropophagous. Here, tell a mukopi * man of the people who has not yet had anything to do with Whites, that there are men who eat their fellows, he will not believe it. They are foreign to any idea of anthropophagy and they would rather starve themselves to death. May I be permitted to contradict here Mr.Stanley who pictures the Baganda as cunning scoundrels, thieves and absolute swindlers, and Mutesa (the only one by whom Central Africa may be Christianized and civilized) barely able by its severity to keep them in just bounds. On the contrary, it could be said that the Muganda people, far from being born with the irresistible desire to enrich themselves violently by rapine and murder, was born with the desire that pushes them towards religion and civilization. But the Baganda, hindered in these good dispositions, encouraged and pushed towards evil instincts, find in the present king instead of a guide and a powerful exciter towards good, an obstacle and an almost insurmountable obstacle that prevents them from Christianizing and civilizing themselves. These people have noble instincts that demand only to be well directed. If only, to the plundering and slave wars to which everyone is forced to take part more or less, could succeed the work of the earth and the teaching of all that can be taken advantage of in this rich country, the love of science and the arts, Baganda would gladly give up their life of robbery. For the Baganda, despite the few faults that must be recognized to them, possess qualities that are not found in many other Negroes. The great desire to know and learn, among other things to learn about religion, would make this well-governed people the first people in Africa to deserve to take their place among the Christian and civilized nations.

Mr Pearson advised Fr.Levesque, to cure his ingrown nail, to put his foot in hot water, and to drink water with bitartrate of potash and tartaric acid.

Lundi 24 janvier

Monday, January 24th

Visite au roi. J’attends patiemment, me désennuyant en lisant quelques numéros des Missions catholiques. Remèdes par Msudi, je fais semblant de ne rien voir.

À l’audience, Kambi Mbaya offre au roi quelques petites bouteilles d’essence et aussi je crois des remèdes. Le roi se montre très bien à mon égard, me dit quelques bonnes paroles. Kombi Mbaya avec son air patelin et son ton nasillard, forme des vœux pour le rétablissement complet du roi. Les Nègres ont un don particulier pour saisir les travers. J’entends quelques femmes du roi qui sont aujourd’hui admises à la séance, rire sous cape et se moquer entre elles de l’élégant Arabe en imitant sa voix nasillarde.

Visit to the King. I wait patiently, I throw away my boredom by reading some numbers of the Catholic Missions. Remedies by Msudi, I pretend to see nothing.

At the hearing, Kambi Mbaya offered the king a few small bottles of oils and also I believe remedies. The king showed himself very friendly towards me, said some good words to me. Kombi Mbaya, with his goody-goody air and his nasal tone, wishes for the complete recovery of the king. Negroes have a special gift for grasping stumbling blocks. I hear some of the King’s women who are now admitted to the session, laughing discreetly and mocking about the elegant Arab by imitating his nasal voice.

Samedi 29 janvier

Saturday, January 29th
(dans la nouvelle maison) les enfants n’auront plus besoin de sortir tous les jours pour aller chercher l’eau et travailler la propriété. (in the new house) children will no longer need to go out every day to fetch water and work on the property.

Δ

 

Février 1881 – pp. 221-224

Samedi 5 février 1881 (suite)

Saturday, February 5th

… imaginable se trouvent renfermés dans ce fatras du Prophète. Le roi trouve que j’ai de l’esprit.

C’est à Mayanja * dieu prince léopard sanguinaire,  que l’on doit immoler les hommes. On orne et de jour et de nuit certains chemins. Les Seigneurs de la corde sont chargés des arrestations. Ils se cachent et tombent à l’improviste sur ceux qui sont en petit nombre et ne peuvent se défendre. Des mwamis * chef administratif – à plusieurs niveaux : kyalo (county), ...  – plur. abaami même, des soldats du roi ne seraient pas épargnés.On les prend, on les lie. S’ils ont des fusils, on les envoie au roi et ils vont augmenter le nombre des malheureuses victimes qui doivent être bientôt immolées. Le diable est toujours altéré de sang. Il s’est présenté sous la forme d’un lubale * divinité, génie et a dit : il me faut des hommes ; et le roi qui se dit l’esclave du lubale n’a osé refuser, craignant de s’exposer davantage à la colère du mauvais génie. Aveuglement des hommes. Ô ! Reine des Cieux, souveraine maîtresse des Anges, Vous qui dès le commencement avez reçu de Dieu le pouvoir et la mission d’écraser la tête de Satan, nous Vous supplions, envoyez vos légions saintes pour que sous vos ordres et par votre puissance, elles poursuivent les démons, les repoussant dans l’abîme. Saints Anges et Archanges, défendez-nous …

Dans l’après-midi, un envoyé du roi vient nous demander un livre arabe-français.

L’homme chargé de faire la maison dit qu’il viendra demain. Nous lui répondons que demain étant notre jour de prière par excellence, il vienne lundi matin.

…imaginable are found enclosed in the Prophet’s hotchpotch. The king finds that I have spirit.

It is to Mayanja * blood-thirsty leopard prince god that men must be immolated. Some roads are decorated day and night. The Lords of the Rope are in charge of arrests. They hide and suddenly fall on those who are in small numbers and cannot defend themselves. Some mwamis * mwami: administrative leader – at several levels: kyalo (county), .. – plur. abaami even king’s soldiers would not be spared. If they have guns, they are sent to the king and they will increase the number of unfortunate victims who must soon be killed. The devil is always blood thirsty. He presented himself in the form of a lubale * divinity, genius and said: I need men. And the king who calls himself the slave of the lubale dared not refuse, fearing to expose himself further to the wrath of evil genius. Blindness of men. O! Queen of Heaven, Sovereign Mistress of Angels, Thou who from the beginning have received from God the power and mission to crush the head of Satan, we beseech You, send your holy legions so that, under your command and by your power, they may pursue demons, pushing them into the abyss. Holy Angels and Archangels, defend us …

In the afternoon, an envoy from the king comes to ask us for an Arabic-French book.

The man in charge of making the house says he’ll come tomorrow. We reply that tomorrow being our day of prayer par excellence, he comes Monday morning.

Dimanche 6 février 1880

Sunday, February 6th

Visite au roi. Dans la route, je rencontre M. Pearson qui me parle du massacre que le roi veut faire. Il vient, dit-il, d’envoyer une lettre au R.P.Livinhac pour lui proposer de demander au roi la mise en liberté des pauvres victimes. Je lui fais comprendre que notre demande sera pour tout le moins inutile ; que si l’on demande au roi la grâce des victimes, il fera semblant de ne rien comprendre, dira qu’il ne veut nullement tuer des hommes, demandera quelle est la mauvaise langue qui a pu dire de pareilles choses. On assurera que si on tue quelques gens, ce n’est nullement de sa faute, mais que c’est l’affaire des Bakadde * Anciens, vieilles personnes et les pauvres victimes n’en seront pas moins sacrifiées. Peut-être même le roi, pour se venger, défendra-t-il à tous ses sujets de mettre le pied chez nous, et voilà tout ce que l’on aura gagné. M. Pearson dit qu’on nous accusera en Europe, nous autres Blancs, d’avoir laissé commettre un tel forfait. (N’y aurait-il pas une ruse de ces messieurs ? Lors du premier massacre, monsieur Pearson avait laissé parfaitement faire). D’ailleurs tout en frémissant de douleur et en suppliant Dieu pour ces pauvres malheureux, étant certains que les efforts que nous pourrions tenter auprès de Sa Majesté seraient inutile et ne serviraient peut-être qu’à entraver le bien que nous pouvons, impuissants comme nous le sommes, il faut nous résigner à garder le silence et à faire comme si nous ignorions la chose. Le R.P. Livinhac répond donc à Monsieur Pearson dans ce sens : « Je ne pense pas que jusqu’à présent, en Europe, on nous ait rendus responsables de l’esclavage et de tous les actes de barbarie qui se commettent dans ce pays, comme s’il dépendait de nous d’abolir l’esclavage et de faire en un jour de ce peuple féroce, des gens civilisés, de remplacer leurs habitudes sauvages et cruelles, par des mœurs charitables et polies leurs diaboliques superstitions. , et tant qu’elles entraînent après elles des désordres, par les préceptes divins de l’Évangile et la pratique des devoirs chrétiens. »

On me dit à la cour que Mayanja mange des chèvres et non des hommes. Où as-tu vu, m’a-t-on dit, qu’on ait pris des gens pour les tuer ? Ceux qui t’ont dit cela sont des menteurs.

Où dans ce pays pourrait-on trouver un témoin qui vienne en face du roi attester qu’il a vu prendre des hommes innocents pour les égorger ? Et quand nous arriverions pour demander la grâce des victimes, tous les assistants à la séance, voyant sur le visage du roi ce qu’il faut dire secrètement : « Mais tu es fou ! Qui t’a dit que le roi voulait tuer des hommes, lui si doux, si bon pour le pauvre peuple ? Que tu es méchant pour penser de telles choses ! Ne parle plus ainsi une autre fois ! … »

Visit to the king. On the way, I meet Mr. Pearson who tells me about the massacre that the king wants to do. He has just, he says, sent a letter to R.P.Livinhac to ask the king to release the poor victims. I make him understand that our request will be at least useless; that if we ask the king for the grace of the victims, he will pretend to understand nothing, say that he does not want to kill men, ask which gossiping rumormonger could have said such things. We will be told that if a few people are killed, it is by no means his fault, but because of the Bakadde * Old, old people and the poor victims will not be less sacrificed. Perhaps even the king, in order to take revenge, will defend all his subjects to set foot at our places, and that is all we will have won. Mr. Pearson says that we, Whites, will be accused in Europe of allowing such a crime to be committed. (Is there not a ruse by these gentlemen? At the time of the first massacre, Mr. Pearson had perfectly allowed it to be done.) Moreover, though trembling with sorrow and pleading with God for these poor wretches, being certain that the efforts we might attempt with His Majesty would be useless and would perhaps serve only to hinder the good that we can, powerless as we are, we must resign ourselves to remain silent and to act as if we ignore the matter. In response to Mr. Pearson, Rev.Fr. Livinhac said: “I do not think that until now, in Europe, we have been made responsible for slavery and all the acts of barbarism that are committed in this country, as if it depended on us to abolish slavery and to turn in one day this ferocious people into a civilized people, to replace their savage and cruel habits, with charitable manners and with polite ways their diabolical superstitions. And as long as they lead to disorder, before being replaced by the divine precepts of the Gospel and the practice of Christian duties.”

They tell me in court that Mayanja eats goats and not men. Where did you see, I was told, that people were taken to be killed? Those who told you that are liars.

Where in this country could we find a witness who comes in front of the king to testify that he saw innocent men being taken to be slaughtered? And when we would arrive to ask for the grace of the victims, all those present at the session, seeing on the king’s face what must be said secretly: “But you are mad! Who told you that the king wanted to kill men, he’s so sweet, so good for the poor people? How wicked you are to think such things! Don’t talk like that again!”

Lundi 7 février 1880

Monday, February 7th

Le Mutongole * chef nommé par le roi Muruani * muluanyi : un guerrier , chargé de faire la maison, arrive de bonne heure avec ses hommes portant une trentaine de piliers. Ces piliers sont en palmier. Le palmier est l’arbre qui est le plus à l’abri des insectes et dont le bois se conserve le plus longtemps en terre sans pourrir. Les hommes se mettent avec ardeur à creuser les trous où doivent être placés les principaux piliers. Le Frère leur fait les coches avec la scie. Pendant que le Frère et moi sommes en train de les placer, un envoyé du roi tout essoufflé arrive me chercher. Je ne sais quelle est la cause de l’appel. Le P.Livinhac m’apprend qu’un des Baganda partis avec M. Wilson pour l’Angleterre est de retour. Je me rends en toute hâte chez le roi. Je vois Savadu, le Muganda de retour du pays des Blancs, vêtu à l’européenne : pantalon en laine, chemise, paletot, culotte. Il a l’air sérieux. N’est-il pas le premier Muganda qui est parvenu en Oulaya * Europe ? Que de choses extraordinaires n’a-t-il pas vues ? Il a de quoi raconter à ses concitoyens. Si tu savais, disait-il à un de ceux qui étaient assis à ses côtés, comme on est changé quand on est instruit, quand on a vu tant de byalo * plur. de kyalo :village, comté . On n’est plus du tout le même homme.

M. Stokes serait à Kageri avec un autre monsieur qui serait plus âgé. Il s’appellerait Philippe. Ce monsieur serait envoyé par la reine Victoria. Je m’attends à voir au moins M.Pearson, mais le roi ne lui aurait pas encore fait l’honneur de l’appeler. Ils ont emmené une caravane de 250 hommes.

A la séance, Savada vient faire son rapport officiel. Le roi a déjà dû l’entendre en particulier. Savada commence la relation de son voyage à partir de Mruli. Il ne donne pas beaucoup de détails. Le roi compte combien de fois ils ont eu à traverser le Nyanza ; il regarde comme des fleuves distincts chaque partie du Nil qui leur semblait faire un fleuve à part, parce qu’après l’avoir quitté plusieurs fois pour voyager par terre, ils le retrouvaient beaucoup plus loin. Il en compte 7 ou 8. Pendant la relation, le roi m’appela auprès de lui pour écouter le narrateur des merveilles d’Oulaya. Non, ce n’est pas un songe, c’est bien Savada que nous voyons, mais comme il est changé. Savada dit qu’en arrivant en Angleterre, on le fit asseoir sur des sièges d’ivoire, qu’on le fit monter dans des maisons traînées par des chevaux : lesquelles maisons étaient tapissées de glaces, et caetera, et caetera. Il parle de la reine à la robe d’argent : des lions, des tigres etc. … des fabriques de canons, fusils, étoffes. Le roi écoute comme un homme que rien n’étonne. Que va-t-il faire ? Probablement, il cherche comment il pourra obtenir le plus de cadeaux possible. Et cependant il n’invite pas messieurs les Anglais à venir le voir !!!

Savada me dit qu’un Français à la longue barbe, venu d’Oujiji, est passé par Oudjoui pour aller dans l’Unuanyembe.

En rentrant, je trouve la plupart des piliers mis en place. Nous espérons que cette maison se fera plus vite que la première fois.

Malgré tout le monde parti à la guerre, il y a encore tous les jours de 15 à 20 catéchumènes qui fréquentent le catéchisme. Plusieurs nouveaux sont arrivés ces jours derniers.

Le soir, le roi envoie Savatimba pour nous demander si nous ne pourrions pas teindre les étoffes en jaune.

Le Frère ayant réussi à faire un magnifique petit pain avec la fleur de farine, nous l’envoyons au roi.

The Mutongole * king appointed senior officer Muruani * muluanyi: a warrior , in charge of building the house, arrives early with his men carrying about thirty pillars. These pillars are made of palm. The palm tree is the tree that is the most resistant to insects and whose wood stays the longest in the ground without rotting. The men began to dig the holes where the main pillars are to be placed. The Brother made ticks for them with the saw. While the Brother and I are in the process of placing them, an out of breath envoy from the King arrives to fetch me. I do not know what the cause of the appeal is. Fr.Livinhac tells me that one of the Baganda who left with Mr. Wilson for England is back. I hasten to the king’s house. I see Savadu, the Muganda back from the Country of the Whites, dressed in a European style: woollen trousers, shirt, paletot, pants. He looks serious. Isn’t he the first Muganda to arrive in Oulaya * Europe ? What extraordinary things did he not see? He has something to tell his fellow citizens. “If you knew, he would say to one of those who sat beside him, how you are changed when you are educated, when you have seen so much byalo * plur. of kyalo:village, county . One is not the same man anymore.”

Mr. Stokes is said to be in Kageri with another older gentleman. His name would be Philippe. He would be sent by Queen Victoria. I expect to see at least Mr. Pearson, but the king would not have done him the honour of calling him. They lead a caravan of 250 men.

At the meeting, Savada comes to make his official report. The king must have already heard it in particular. Savada begins the relationship of his journey from Mruli. He does not give much details. The king counts how many times they have had to cross the Nyanza; he considers as separate rivers every part of the Nile which seemed to them to make a river apart, because after having left it several times to travel by land, they found it much further. During the relationship, the king called me near him to listen to the narrator of the wonders of Ulayya. No, it is not a dream, it is Savada that we see, but as he is changed. Savada says that when he arrived in England, he was made to sit on ivory seats, that he was made to ride into houses dragged by horses: which houses were covered with mirrors, et cetera, et cetera. He talks about the queen in the silver dress: lions, tigers etc. … factories of guns, riffles, fabrics. The king listens like a man that nothing surprises. What is he going to do? Probably, he is looking for how he will be able to obtain as many gifts as possible. And yet he does not invite the English gentlemen to come and see him!!

Savada tells me that a Frenchman with a long beard, coming from Oujiji, passed through Oudjoui to go to Unuanyembe.

When I come back, I find most of the pillars put in place. We hope that this house will be done faster than the first time.

Though all those who went to war, there are still 15 to 20 catechumens who attend catechism every day. Several new comers have arrived in recent days.

In the evening, the king sends Savatimba to ask us if we could dye the fabrics into yellow.

The Brother succeeded in making a magnificent roll of bread with the fine flour. We send it to the king.

Mardi 8 février 

Tuesday, February 8th
Les travailleurs de la maison arrivent ; ils passent tout leur temps à dresser des échafaudages pour pouvoir mettre les poutres du haut. Ces pauvres gens, obligés de travailler ici, ont cependant leur kyalo * village, comté bien loin ; ils sont loin d’avoir le confortable qu’ils ont … The builders of the house arrive; they spend all their time building scaffolding to be able to put the upper beams. These poor people, forced to work here, however, come from far away kyalo * village, county ; they are far from having the comfort they have …

Samedi 26 février

Saturday, February 26th
Le Frère Amans commence la cuisine avec des bois que l’on recouvrira ensuite de terre. La toiture sera en peau de bœuf. De cette manière, l’incendie sera bien moins à craindre. Brother Amans starts the kitchen with wood which will then be covered with earth. The roof will be made of cowhide. In this way, inferno will be much less to be feared.

Dimanche 27 février

Sunday, February 27th
La journée se passe dans le recueillement. Nous commençons une neuvaine à St. François Xavier pour obtenir complète liberté d’enseigner notre sainte religion dans le Buganda. The day is spent in meditation. We begin a novena at St. Francis Xavier to obtain complete freedom to teach our holy religion in Buganda.

Lundi 28 février

Monday, February 28th
Les ouvriers achèvent notre maison. Cette fois, grâces à Dieu, notre maison qui est plus grande que la première, a été finie en trois semaines et sans toutes les misères que nous avait coûtées la première; que la Sainte Vierge en soit louée. The workers are finishing our house. This time, thanks to God, our house, which is larger than the first one, was finished in three weeks and without all the miseries that the first had cost us; the Blessed Virgin be praised.

Δ

 

Mars 1881 – pp.232-233,  240

Mardi 1er mars

Tuesday, March 1st
Visite au roi; j’y rencontre Mr.Pearson mandé par le roi. Petit cadeau pour remercier sa Majesté de ce qu’il a fait construire notre maison: petit sac en perles. Le roi m’appelle prés de lui. Ensuite Mr.Pearson. Il dit que le secret qu’il avait dans son cœur, il le découvre aujourd’hui. Il veut ou rompre complètement avec les Blancs ou devenir définitivement leur ami. Il demande pourquoi les Blancs qui ont apporté tant de choses à Saïd Barg, ne lui en apportent-ils pas aussi. Il voudrait faire le commerce avec les Blancs. Les Blancs venus jusqu’à présent chez lui ne veulent pas faire le commerce. Il veut des Blancs commerçants et leur acheter toutes leurs belles choses à bon marché. Mr.Pearson et moi répondons que le plus grand obstacle à la venue des commerçants est la mauvaise route. Le roi dit qu’il faut songer aux moyens de faire une route sûre. Un Arabe demandant de partir donnant pour raison qu’il meurt de faim ici, alors le roi lui répond: laisse moi donc terminer notre chaouri * shauri: discussion, affaire ; est-ce que tu peux, toi faire une route sûre? Mr.Pearson demande “Combien veux-tu de Blancs? Trois, quatre, cinq ? – J’en veux autant qu’au “Pwani” * au bord de la mer, sur la Côte. Ici, chez le Sultan de Zanzibar. . Mr.Pearson, demande à aller au-devant de ses confrères. Le roi refuse poliment : le rusé matois! Il a peur que les présents de la nouvelle caravane lui échappent; et au besoin, il deviendrait protestant s’il pouvait ainsi avoir des cadeaux. Pauvre Kambi Maya; le roi aurait dit qu’il est “mlalu * fou, dément “. Il aurait du mal à se procurer sa nourriture et celle de ses gens. Visit to the king; there I meet Mr.Pearson requested by the king. Small gift to thank His Majesty for having built our house: small bag of pearls. The king calls me beside him. Then Mr.Pearson. He says that the secret that he had in his heart, he unveils it today. He either wants to break up completely with the Whites or become their permanent friend. He asks why the Whites who brought so much to Said Barg, do not bring as much to him too. He would like to trade with the Whites. The Whites who have come to him so far do not want to trade. He wants white traders and buy them all their beautiful things at a cheap price. Mr.Pearson and I reply that the biggest obstacle to the coming of the merchants is the bad road. The king says we must think of ways to make a safe road. An Arab asks to leave because he is starving here. Then the king answers: “Let me finish our chaouri * discussion. Can you make a safe road?” Mr.Pearson asks “How many white people do you want? Three, four, five? – I want as many as the “Pwani” * at sea, along the coast. Here, in the Sultanate of Zanzibar . Mr.Pearson asks to go to meet his arriving colleagues. The king politely refuses: the cunning deceiver! He was afraid that the gifts of the new caravan would escape him; and if need be, he would become a Protestant if he could thus have gifts. Poor Kambi Maya; the king is said to have called him “mlalu * crazy, demented “. He is said to have a hard time getting his food and his people’s food.

Vendredi 4 mars

Friday, March 4th
Je vais voir le roi qui se montre immédiatement et congédie l’assemblée après quelques minutes d’audience. J’apprends que Kambi-Mbaya s’est présenté à la seconde séance et a demandé au roi de partir dans trois jours. Le roi refuse. Il aurait frappé hier un Arabe, homme de Said ben Selim, parce que celui-ci aurait dit au roi que lui, Kambi-Mbaya, était un esclave d’un banian * Asiatique, Indien et non, l’homme et l’envoyé de Said. Le roi aurait reproché à Kambi ses mensonges et ses calomnies par rapport aux Blancs. I’m going to see the king who shows up immediately and dismisses the assembly after a few minutes of audience. I hear that Kambi-Mbaya came to the second session and asked the king permission to leave in three days. The king refuses. Yesterday he allegedly hit an Arab, a man of Said ben Selim, because the fellow told the king that he, Kambi-Mbaya, was a slave of a banian * Asian, Indian and not the man and the envoy of Said. The king allegedly reproached Kambi for his lies and slander against the Whites.

Dimanche 6 mars

Sunday, March 6th
Visite au roi. Après la première séance, le roi me fait dire d’attendre. Il me fait ensuite dire par le Kurugu * Kurugi: Trésorier du roi  : “Tu es un homme d’esprit et moi aussi j’ai beaucoup d’esprit. Ne pourrions-nous pas avec cela faire une belle maison en pierres ?” Je lui fais répondre qu’ici, n’ayant ni ouvriers, ni chaux, la chose serait difficile, que je veux avant demander l’avis de mes confrères. Les deux premiers ministres sont ensuite appelés en secret. On appelle ensuite Kambi-Mbaya et moi. Le roi leur donne un bœuf. Le roi dit ensuite à ses ministres que lui aussi veut avoir une maison en pierres. Les ministres applaudissent. Le roi réfute mon objection du défaut de chaux, en disant que la terre de fourmis et une espèce de terre blanche que l’on appelle le noni * chalk , et dont les Baganda se barbouillent le visage quand ils vont à la guerre, pourrait très bien remplacer la chaux. Visit to the King. After the first session, the King told me to wait. He then made me told by the Kurugu * Kurugi: Treasurer : “You are a man of spirit and I too have a lot of spirit. Could we not with this make a beautiful stone house?” I have him answered that, since there are no skilled workers and no lime, it would be difficult to do, I want to seek the advice of my colleagues. The two prime ministers are then called in secret. Then Kambi-Mbaya and I are called. The king gives them an ox. The king then told his ministers that he too wanted a stone house. The ministers applauded. The king refutes my objection to the lack of lime, saying that ant soil and a kind of white earth called noni * chalk , which the Baganda smear their faces with when they go to war, could very well replace lime.

Dimanche 13 mars

Sunday, March 13th
Le Blanc peut se dispenser ici sans offusquer personne de certaines règles d’usage dans le pays, comme de paraître la tête découverte le jour où le roi a perdu l’un de ses enfants ou de ses proches (…) mais lorsqu’on peut sans inconvénient se soumettre à certains usages, (…) cela fera toujours bonne impression. Here, a White man can dispense of certain rules in use in the country without offending anyone, such as to appear the head discovered the day the king lost one of his children or relatives (…) but when we can without inconvenience submit to certain uses, (…) It will always make a good impression.

Mardi 22 mars

Tuesday, March 22nd
[O’Flaherty. 43 ans. Connaît l’arabe et le persan, un peu de français. Vient comme linguiste. Etait colonel dans l’armée avant d’être ministre du culte.] [O’Flaherty. 43 years old. Speaks Arabic and Persian, little French. Here as a linguist. Was a Colonel in the army before becoming a pastor.

Vendredi 26 mars

Friday, March 26th

Dans l’après-midi, le roi fait appeler MM.Pearson et Philippe qui lui apporte un remède, mais c’est pour la forme. M.Philippe avait dit qu’il n‘avait pas apporté de remèdes d’Europe pour sa Majesté. M.Philipe présente le remède sans y goûter. Le roi craignant d’être empoisonné dit à l’Anglais d’en boire. M.Philippe répond que les remèdes sont pour les malades; que lui n’étant pas malade, il ne veut pas en boire. Idi ayant essayé d’en boire, M.Philippe lui aurait arraché la bouteille des mains et jeté le remède à la figure. M.Philippe lui aurait dit: « Surtout ne mêle pas d’autres remèdes avec le mien, autrement, tu mourras. »

Je sens la fièvre qui commence.

In the afternoon, the king summoned Messrs.Pearson and Philip who brought him a remedy, but it was formal. Mr.Philippe had said that he had not brought any remedies from Europe for His Majesty. Mr.Philipe presents the remedy without tasting it. The king fearing poisoning told the Englishman to drink it. Mr.Philippe replied that the remedies are for the sick people; that he was not sick and did not want to drink them. Since Idi tried to drink it, Mr.Philippe would have grabbed the bottle from his hands and thrown the remedy to his face. Mr. Philippe is quoted as saying: “Don’t mix other remedies with mine, otherwise you will die.”

I feel the fever starting.

Samedi 27 mars

Saturday, March 27th
Je vais voir le roi; il me raconte l’aventure du remède d’hier. Je lui dis qu’il n’a rien à craindre. Le remède ne contient rien de mauvais. J’étais en route pour revenir quand un page vint me chercher de nouveau. Le roi veut me montrer le remède reçu des Anglais; il l’avait déjà fait porter à Rubaga, son ancienne résidence, bien résolu probablement à ne jamais s’en servir. Il me dit qu’il craint de prendre des remèdes des Anglais qui sont étrangers, qu’il aime mieux que je lui en donne moi-même, qu’il craint de mêler quelqu’affaire avec le remède des Anglais. Tandis qu’avec le mien, il prend tout ce qu’il veut. Je goûte du remède des Anglais en sa présence afin de bien le rassurer. Il me demande si les Anglais n’ont pas de djoho (?), c’est-à-dire pourquoi ils ne lui en ont pas donné. Ensuite, il me dit que Saïd Barg était malade comme moi et on l’a guéri en Oulaya * Europe . Tous tant que nous sommes, nous n’avons pas d’esprit. Toi seul, tu as de l’esprit, faisant allusion à ce que je lui ai dit bien souvent: si tu veux guérir, éloigne de toi toutes ces femmes, et reste un ou deux mois bien tranquille ne songeant qu’à te guérir. Je lui explique qu’en France, ceux qui veulent guérir sont placés dans une maison où ils ont tout ce qu’il leur faut, mais où on éloigne du malade tout ce qui pourrait retarder ou empêcher sa guérison. I go to the king; he tells me about the issue of yesterday’s renedy. I tell him that he has nothing to fear. The medicine does not contain anything bad. I was on my way back when a page came looking for me again. The king wants to show me the remedy received from the English. He had already had it carried to Rubaga, his former residence, probably well resolved never to use it. He tells me that he is afraid to take remedies from the English who are foreigners, that he prefers that I give them to him myself, that he is afraid to mix any thing with the remedy of the English. While with mine, he takes whatever he wants. I taste the remedy of the English in his presence in order to reassure him. He asks me if the English do not have a djoho (?), that is to say why they did not give him one. Then he told me that “Saïd Barg was sick like me and was healed in Oulaya * Europe “. All of us as many as we are, we have no minds. “You alone have a mind,” alluding to what I have often said to him: if you want to heal, keep all these women away from you, and stay a month or two very quiet, thinking only of curing yourself. I explain to him that in France, those who want to heal are placed in a house where they have everything they need, but where everything that could delay or prevent their recovery is taken away from the patients.

Δ

Avril Mai 1881 – pp. 251 & 254

Mercredi 27 avril

Wednesday, April 27th

(…) J’ai proposé en secret au roi, s’il le voulait, un ou deux zouaves pour instruire son armée. (…)

… l’Ounyanyembé et une pour Mr. Copperston.

(…) I secretly proposed to the king, if he so wished, one or two zouaves * soldier in a special regiment of the French colonial army as instructors for his army. (…)

… in Ounyanyembé and one for Mr. Copperston.

Jeudi 28 avril

Thursday, April 28th

Visite au Kaouta, philosophe ensorcelé.

On amène le soir l’âne de Mascate que le roi avait prêté * certainement : emprunté à Kambi Mbaya pour que j’aille demain visiter un officier de sa Majesté qui a reçu il y a plusieurs jours, un coup de fusil du Mkabia * Mukabya : un autre nom de Mutesa, qui signifie «celui qui fait pleurer» .

Visit to the Kauta, a bewitched philosopher.

In the evening, the donkey of Muscat, which the king had borrowed from Kambi Mbaya, is brought so that tomorrow I may visit an officer of His Majesty who received several days ago a shot from the Mkabia * Mukabya: another name for Mutesa, which means «the one who makes you cry» .

Vendredi 29 avril

Friday, April 29th
Après la messe, je pars avec un soldat du roi qui se trouve juste être un chrétien. L’âne de Mascate est parfaitement harnaché et disposé à marcher. Un jeune Mgalagala * mugalagala : un page chargé de précéder l’âne, nous attend à la porte, et nous voilà partis par le chemin des Bakialas  ou dames du roi, parce qu’il est plus court que celui par où on passe d’habitude. De la montagne de Makerere, d’un côté nous apercevons le Nyanza dont le vent frais vient nous rafraîchir; de l’autre côté, les mille petites collines, les unes couvertes de bananeraies, les autres encore incultes. Nous passons ensuite sur le flanc de la montagne Nanguru. Immenses bananeraies des femmes du roi, qui s’étendent jusqu’au Nyanza. Les Batete * vieux, gardiens du harem (gardiens des femmes) ont leurs habitations le long de la route que nous suivons. Les femmes que nous rencontrons s’enfuient au galop ou se cachent dans les herbes à la vue de l’âne blanc et du Mzungu * Européen ; d’autres de plus loin appellent leurs voisines et suivent même un peu en arrière pour voir de plus près l’homme blanc monté sur un nsoro * nsolo : animal (sauvage, effrayant) blanc. Un sentier à travers des roseaux nous conduit au kialo des malades. Retour. Visite au roi pour lui rendre compte de l’état du malade. J’apprends que le matin il a donné un bœuf au P.Livinhac.  Le voyage m’a fatigué, je suis obligé de me coucher en rentrant. After the mass, I leave with a soldier of the king who happens to be a Christian. The donkey of Muscat is perfectly harnessed and willing to walk. A young Mgalagala * mugalagala: a page in charge of preceding the donkey, waits for us at the door, and here we go by the way of the Bakialas or ladies of the king, Because it’s shorter than the one one usually go through. From the mountain of Makerere, on one side we see the Nyanza whose fresh wind comes to cool us; on the other side, the thousand small hills, one covered with bananas, the other still uncultivated. We then pass on the flank of Nanguru Mountain. Huge banana groves of the king’s wives, which extend down to Nyanza. The Batetes * old men, custodians of the harem (female guardians) have their homes along the road we follow. The women we meet run away or hide in the grass at the sight of the white donkey and Mzungu * European ; others from far call their neighbors and even follow back a bit to see more closely the white man mounted on a white nsoro * nsolo: animal (wild, scary) . A path through reeds leads us to the kialo of the sick. Return. Visit to the king to report on the condition of the patient. I learn that in the morning he gave a beef to Fr.Livinhac. The trip exhausted me, I have to go to bed on reaching home.
   

Mercredi 11 mai

Wednesday, May 11th

(…) de mourir et qui hier encore envoyait son esclave chercher les crottes de notre âne pour s’en faire un remède contre la mort. Le pire de tout cela, c’est qu’il empêche ses gens de venir  assister à notre catéchisme. Un de ceux qui sont auprès de lui a refusé formellement de porter les amulettes qu’il lui donnait. Mukasa, notre ancien architecte que nous n’avions admis qu’après de longues épreuves au catéchisme, irait, à ce qu’il paraît, chez Mr.Flaherty pour lui enseigner le luganda.

Un jeune catéchumène dont la charge chez le roi est d’être dans la maison royale jour et nuit sans jamais  pouvoir sortir à l’extérieur, et qui avait interrompu pendant quelques jours ses fonctions pour cause de maladie, vient aujourd’hui nous dire au revoir pour rentrer de nouveau dans sa charge. Le pauvre avait les larmes aux yeux; c’est que sa charge est pleine de périls pour l’âme et pour le corps.

Depuis la maladie du roi, à ce qu’il paraît, personne ne sort de cette fonction que par la mort. Le roi craint qu’on découvre au public ce que l’on peut avoir vu et entendu et surtout combien il est malade. Aussi quand le jeune homme, après plusieurs années ne plaît plus au roi, pour une cause ou une autre, il l’envoie au supplice.

(…) to die, and who yesterday sent his slave to fetch the dung of our donkey to make himself a remedy against death. The worst part of it is that he prevents his people from attending our catechism. One of those who is close to him has formally refused to wear the amulets he gave him. Mukasa, our former architect whom we had admitted only after long tests in catechism, would go, it seems, to Mr.Flaherty’s to teach him luganda.

A young catechumen whose duty in the king’s house is to be in the royal house day and night without ever being able to go outside, and who had interrupted his duties for a few days because of illness, comes to say goodbye to us today as he returns to his office. The poor boy had tears in his eyes; for his job is very dangerous for the soul and for the body.

Since the king fell sick, it seems, no one leaves this job except by death. The king fears that the oe in charge will discover to the public what he has seen and heard and especially how sick he is. So when the young man, after several years, no longer pleases the king, for one cause or another, he is sent by him to torment.

Jeudi 12 mai

Thursday, May 12th
Le Frère termine une petite cave de 8mc où nous cachons la poudre et autres petites choses en cas d’incendie. The Brother completes a small excavation of 8sqm where we can hide gun powder and a few other small things, in case of arson.

Vendredi 13 mai

Friday, May 13th

Le P.Livinhac va voir le roi. Il y rencontre M.Flaherty.

Le roi par crainte que Bargach * Saïd Bargash ou les Blancs s’emparent du Sukuma veut y planter son drapeau.

Father Livinhac went to see the king. There he met Mr.Flaherty.

The king fears that Bargach * Saïd Bargash or the Whites take the Sukuma and so wants to plant his flag on the territory.

Samedi 14 mai

Saturday, May 14th

Pendant la nuit dernière, vacarme pour chasser le Rumbe.

Visite à Ssekiboobo * titre du chef de la province du Bulemezi.

Rapport de Kaggwa sur les paroles que Mr.Flaherty aurait dites au roi.

Les Anglais ont été “gnangagnés * de kunyaga : piller ” par le Mujasi * titre du chef des fusiliers, nommé par le roi, général, un des chefs des soldats du roi qui leur a ravagé un petit coin de bananeraie attenant à leur propriété. Mr.Flaherty vient demander justice.

During last night, rumble to hunt the Rumbe.

Visit to Ssekiboobo * title of the chief of Bulemezi.

Report from Kaggwa on the words Mr.Flaherty allegedly said to the king.

The English were “gnangagnés * ” by the Mujasi * chief of the royal guards, appointed by the king , one of the chiefs of the soldiers of the king who devastated a small corner of their banana plantation adjoining their property. Mr.Flaherty comes to demand justice.

Vendredi 20 mai

Friday, May 20th

[O’Flaherty demande à Mutesa deux femmes pour cultiver sa bananeraie.]

Il veut se montrer galant avec les dames du roi assises près de lui, il fait beaucoup rire l’assemblée. Ils sont étonnés de sa liberté un peu trop naïve. Ici, la politesse exige que l’on n’accepte rien de la main d’une femme.

[O’Flaherty asks Mutesa for two women to cultivate his banana grove. ]

He wants to be gallant with the king’s ladies sitting next to him, and makes the assembly laugh a lot. They are surprised by his somewhat too naive freedom. Here, politeness demands that one accept nothing from a woman’s hand.

Lundi 30 mai

Monday, May 30th
[O’Flaherty fait la leçon au roi avec brusquerie. Reproches sur sa conduite avec ses femmes. Mutesa :] « Entendez-vous comment un Mzungu * Européen nous insulte tous ? » [O’Flaherty bluntly lectures the king. Reproaches on his conduct with his wives. Mutesa:] “Do you hear how a Mzungu * European insults us all?”

Δ

Juin 1881 – pp. 258-263

Lundi 6 juin

Monday, June 6th
(…) éléphants.  Il va partir bientôt. Il prend une trentaine Bagandas avec lui. Il promet de revenir bientôt. (…) elephants. He will leave soon. He will take about thirty Baganda along with him. He promises he will be back soon.

Mardi 7 juin

Tuesday, June 7th

Visite au roi. J’y rencontre monsieur Flaherty.

Celui-ci en parlant au roi de sa maladie se sert de termes si grossiers que le second ministre me prie de l’avertir que chez les Baganda, on ne se sert pas de telles expressions; il parle beaucoup, mais est peu compris.

Mr.Flaherty surpris par l’orage vient chez nous où il mange.

Visit to the King. I meet Mr Flaherty there.

The latter, in speaking to the king of his illness, uses such rude terms that the second minister asks me to warn him that in Buganda, one should not use such expressions; he speaks a lot, but is little understood.

Surprised by the storm, Mr.Flaherty comes to ours and eats.

Mercredi 8 juin,

Wednesday, June 8th
Je vois le roi et lui demande une petite campagne; le roi accorde. I see the king and ask him for a farm. The king grants.

Vendredi 10 juin

Friday, June 10th

Le matin, je vais voir le roi et lui dis l’endroit qui m’a paru convenable. Le roi l’accorde: “Mais que va dire Mackay?” ajoute-t-il. Mr.Flaherty est reçu après moi. Je vais avec un Mbaka pour me faire assigner les limites de notre campagne. Le nouveau mohami * mwami : chef administratif – à plusieurs niveaux : kyalo (county), ...  – plur. abaami fait le difficile, cherche des retards. Ministre de paix, ne voulant pas mal impressionner des gens qui demanderont peut-être demain a s’instruire de notre religion, je n’insiste pas. Je dis que ce n’est pas mon affaire, mais celle du roi. Le soir, je rencontre quelques-uns de nos catéchumènes qui m’abordent d’un air tout contristé, me disant qu’en vient de saisir Namulabira, leur compagnon qui est leur chef, victime d’une calomnie. Tous les gens de cette maison des pages du roi, à l’exception de deux, sont catéchumènes. Ces pages ont leur maison tout auprès de celle du roi. Ces jours derniers, par l’imprudence d’un esclave, leur maison a pris feu. Le roi alors les a tous chassés de chez lui. Il les fait rappeler ce matin. Ce soir, il vient de faire saisir Namulabira, leur chef, accusé d’avoir  été avec une de ses femmes. Cette accusation est sans preuve. On reproche de plus aux pages de cette maison d’acheter leur nourriture à une  femme du roi. Ce qui s’est toujours fait ainsi. Ces malheureux ne recevant rien du roi pour leur nourriture sont obligés de faire du savon  avec le suif qu’ils tâchent de se procurer ici ou là, et de le vendre pour en retirer quelques simbis * cauris pour acheter du méré * nourriture. Connaissant le caractère du roi qui, lorsqu’il en veut aux uns ou aux autres, fait faire un msango * procès, jugement sous un prétexte ou sous un autre – pour avoir l’air de ne pas condamner injustement celui qui lui a déplu. Nous soupçonnons qu’il y a en dessous quelqu’autre motif.

Plusieurs catéchumènes compagnons de Namulabira * dont Gonzague Gonza sont venus nous trouver ce soir pour nous faire part de leur douleur. “On va peut-être nous saisir  aussi, mais peu importe ! nous irons au ciel.” On doit faire le msango demain matin et peut-être demain soir, les oiseaux de proie dévoreront- ils le corps de l’innocent.

In the morning, I go to the king and tell him the place which is suitable according to me. The king grants it: “But what will Mackay say?” he adds. Mr. Flaherty was received after me. The new mohami * mwami: administrative leader – at several levels: kyalo (county), ... – plur. abaami creates difficulties, looks for delays. Minister of peace, not wanting to badly impress people who may ask tomorrow to learn our religion, I do not insist. I’m saying it’s not my business, but the king’s. In the evening, I met some of our catechumens who approached me with a very contrite air, telling me that Namulabira, their companion who is their leader, had just fallen victim of a slander. Everyone in this group of the king’s pages, with the exception of two, are catechumens. These pages have their house next to the king’s house. In recent days, because of the carelessness of a slave, their house caught fire. The king then drove them all out of his home. He called them back this morning. This evening, he just had Namulabira, their leader, arrested for having been with one of his wives. This accusation is without evidence. Moreover, the pages of this group are accused of buying their food from a king’s wife. This has always been the case. These wretches who receive nothing from the king for their food are forced to make soap with the tallow they try to buy here or there, and sell it to earn some simbis * cauris to buy mere * food. Knowing the character of the king who, when he is angry with one or the other, makes a msango * trial, judgement under one pretext or another – in order to appear not to condemn unjustly those who displeased him. We suspect there’s something else underneath.

Several of Namulabira’s fellow catechumens * of which Gonzague Gonza came to us tonight to share their pain.” They may seize us too, but it doesn’t matter! We’ll go to heaven.” The msango is to be held tomorrow morning and maybe tomorrow night, the birds of prey will eat the innocents’bodies.

Dimanche 12 juin

Sunday, June 12th

Sachant que l’on devait faire le msango de Namulabira aujourd’hui, je me rends chez le roi dans l’espérance d’être utile  à ce pauvre innocent. Aujourd’hui, il y a grande séance. Toli revenu du Bunioro avec ses pembés * guerriers et tout son butin, amène le chef du pays conquis faire sa soumission au roi.

J’attends au kuruzé * le Trésor, composé de 3 magasins quelque temps; on m’apprend que l’on amène le prisonnier. Je vais l’attendre à une porte où je sais qu’il doit passer. Je le vois paraître bientôt les mains liées par une corde qui lui passe autour du cou. Il est maigri effroyablement. Sa figure cependant conserve les traits d’un homme résolu et même a l’air de ne craindre aucunement la mort. Ses amis qui ,il y a deux jours, l’avaient vu revêtu de son étoffe blanche, causer familièrement avec eux, l’abordent d’un air contristé pour le  saluer. Le plus grand nombre lui témoigne de l’intérêt; tous l’aimaient. Ils savent qu’il est innocent et ils se le disent tout bas à l’oreille. Celui qui le tient par la corde l’amène s’asseoir dehors dans la cour. Je profite d’un moment où le monde s’est retiré pour l’aborder. Je le trouve bien résigné, je lui demande si on va le tuer: “Probablement me dit-il en souriant, mais je ne crains pas la mort; même je la désire. Mourir ce n’est rien. Si je perds mon msango, dit-il, on me tuera ce soir.” Je lui demande alors s’il a reçu le baptême, il me dit que oui, un de ses compagnons le lui ont donné hier soir. En entendant le mot de baptême, son gardien ne comprenant pas, lui demande ce qu’il signifie. Namulabira se met à sourire à cette question de son geôlier. Ne pouvant pas par prudence lui faire aucune exhortation, je me retire en lui disant: “alors c’est bien.” J’espérais qu’on l’amènerait et que l’on ferait son procès à la séance; mais tout d’un coup, on vient le chercher pour le conduire à sa prison. Je le regrettais beaucoup parce que le roi aujourd’hui, paraissait bien disposé et j’eus probablement pu obtenir son pardon. Je demande au roi d’avoir la campagne à Ngongolo, un peu à droite sur le chemin de Nteve * Entebbe. Le roi me l’accorde même avec un certain empressement.

L’après-midi, tout-à-coup, nous voyons arriver deux petits pages; nous lisons sur leur visage quelque mauvaise nouvelle. On va brûler Namulabira nous disent-ils. Il a été conduit devant le roi et a dit qu’il n’avait fait aucun mal avec la femme  avec laquelle on l’accusait d’entretenir des relations. Le roi alors a dit: “Puisse qu’il refuse d’avouer, qu’on le fasse souffrir, qu’on le fasse brûler.” Immédiatement après la sentence, Namulabira avait envoyé ces deux petits pages * Gonza et un autre nous informer du supplice qu’on lui réservait. C’est la coutume ici, quand quelqu’un est condamné, d’en informer les parents et amis. Namulabira n’ayant plus de parents, c’était nous qui tenions la place. Nous lui faisons porter quelques paroles de consolations par ses envoyés. Quelque temps après, l’un d’eux revenait nous dire qu’on allait le mettre à la torture pour le forcer d’avouer un crime dont il était innocent. “Dis aux Pères que je ne crains pas la mort, que mon cœur est ferme.” Nous engageons les messagers à aller le voir à l’exciter à pardonner à ceux qui le font ainsi souffrir injustement. Le soir, un catéchumène vient nous dire que l’on a brûlé les pieds des deux accusés jusqu’au-dessus des chevilles, et que malgré ce supplice, ils ont tous deux persévéré à assurer qu’ils étaient innocents. Celui qui nous apportait cela, avait les larmes aux yeux: “Bientôt notre tour va venir ! S’il se contentait de nous tuer simplement sans nous faire souffrir ainsi! Mais il est trop cruel. Un jour, à Rubaga. il nous a dit: «Je vous tuerai tous. Mon père est mort, tous les kabakas sont morts; un jour, moi aussi je mourrai; il faut pendant que je vis encore que je fasse tuer un bon nombre.» Il n’ose plus faire tuer publiquement du monde comme autrefois parce qu’il a peur qu’on ne se révolte, mais il en fait tuer beaucoup en secret.”

Knowing that the msango of Namulabira was to be performed today, I went to the king in the hope of being useful to this poor innocent. Today is a big meeting. Toli returns from the Bunioro with his pembés * warriors and all his booty. He brings the conquered leader to make his submission to the king.

I wait at the kuruzé * The Treasury, with its 3 stores for a while; I am told that the prisoner is being taken. I will wait for him at a door where I know he must pass. I see him soon appearing with his hands tied by a rope that runs around his neck. He is terribly thin. His face, however, retains the features of a resolute man and even seems not to fear death. His friends, who two days ago had seen him dressed in his white cloth, talking with them in a familiar manner, approached him with a contrite air to greet him. The greatest number of them showed him sympathy; they all loved him. They know he is innocent and they say it out loud. The fellow who holds him by the rope takes him to sit outside in the courtyard. I take advantage of a moment when people has withdrawn to approach him. I find him quite resigned, I ask him if he will be killed: “Probably, he told me with a smile, but I do not fear death; even I desire it. Dying is nothing. If I lose my msango, he says, I will be killed tonight.” I then asked him if he had received baptism, he told me that yes, one of his companions gave it to him last night. Hearing the word of baptism he does not understand, his guardian asks him what it means. Namulabira starts to smile at this question of his jailor. Not being able by prudence to make him any exhortation, I withdraw myself saying to him: “Then it is good.” I was hoping that he would be brought and tried at the session, but all of a sudden, they come and take him to his prison. I regretted it very much because the king today, seemed well disposed and I probably had been able to obtain his forgiveness. I ask the king to have the countryside in Ngongolo, off to the right on the way to Nteve * Entebbe. The king even grants it to me with a certain eagerness.

In the afternoon, all of a sudden, we see two little pages coming in; we read some bad news on their faces. They’ll burn Namulabira, they tell us. He was brought before the king and said that he had done no harm to the woman with whom he was accused of having relations. The king then said, “Since he refuses to confess, let him be made to suffer, let him be burned.” Immediately after the sentence, Namulabira had sent these two small pages * Gonza et un autre to inform us of the torture that was reserved for him. It is the custom here, when someone is condemned, to inform relatives and friends. Namulabira had no more parents, so we held the place. We made him conveyed some words of consolation through his envoys. Some time later, one of them came back to tell us that they were going to torture him to force him to confess to a crime of which he was innocent.Tell the Fathers that I do not fear death, that my heart is firm.” We urge the messengers to go to him to excite him to forgive those who make him suffer unjustly. In the evening, a catechumen came to tell us that the feet of the two accused had been burned up to the top of their ankles, and that despite this torture, they both persevered in assuring that they were innocent. He who brought us this, had tears in his eyes: “Soon our turn will come! If he would just kill us without making us suffer like that! But he is too cruel. One day, in Rubaga, he said, “I will kill you all. My father is dead, all the kabakas are dead; one day I too will die; while I am still alive I must have many killed.” He no longer dares to publicly kill the world as he once did because he is afraid that we will revolt, but he kills many people secretly.”

Lundi 13 juin

Monday, June 13th
Je pars avec un fils du Banoga et un mubaka * mubaka: messager, agent, représentant du roi pour le kialo * village, campagne, exploitation agricole . Le kialo Ngongolo est un mythe; il a peut-être cependant existé autrefois, mais maintenant les roseaux ont remplacé les bananiers. I leave with a son of the Banoga and a mubaka * mubaka: messenger, agent, representative of the king for the kialo * village, countryside, farm . The Ngongolo kialo is a myth; it may have existed in the past, but now the reeds have replaced the banana trees.

Samedi 18 juin

Samedi, June 18th
Misères avec le kialo. Les Bakopis * les petites gens, gens du peuple, ici paysans et Namukadde, celui qui a été en Angleterre, nous font des difficultés.

Lundi 20 juin

Namukadde fait encore des difficultés. A la séance, je l’interpelle et en face du roi, Je le prie d’écouter les paroles qui lui sont dites et surtout de les accomplir. Le roi lui ordonne en ma présence de donner quelque chose de bien: quatre bonnes bananeraies.

Mr. Flaherty parle beaucoup selon son habitude, vante Mackay, dit qu’il a beaucoup d’esprit, qu’il lui fera un char, des ponts, des canaux, une belle maison. Ayant dit que Musudi était un ivrogne, qu’il ne connaissait pas l’arabe, qu’il était comme un perroquet, l ‘Arabe piqué,  lui dit: ”Puisque tu te vantes tant de savoir l’arabe, dis-moi ce que cela veut dire” et lui cita quelques paroles en arabe.  Mr.Flaherty, probablement ne comprenant pas, dit qu’il ne peut pas bien rendre. Mais dis-le en anglais à ton interprète. Mr. Flaherty décline, ce qui fait qu’aux yeux du roi et de ses gens, Musudi l’emporte. Le roi dit: “Moi, si j’ai tant d’esprit, c’est parce que j’ai commencé par “kusomer * kusoma: lire, étudier “. Je veux que mes gens “kusoment” aussi.” Et aussitôt, il fait appeler un chef de soldats et lui dit: “Dis à tes gens que je veux qu’ils sachent deux choses: kusomer et manier le fusil. ” M.Flaherty n’ayant pas compris, je lui traduis les paroles du roi. Je remercie le roi. Mr.Flaherty fait de même. Comme il ne peut pas rester un moment sans rien dire, le roi, désirant lui imposer silence poliment, dit à Msudi: “En arabe, comment dit-on à quelqu’un quand on veut dire: tais-toi ?” Msudi lui répond: “On lui dit: Eskout.” Mr.Flaherty continuant sans s’apercevoir de la pointe, le roi heureusement leva la séance.

Nous envoyons aujourd’hui quelques lettres par Sabatimba qui part avec Kambi-Mbaya.

Trouble with the kialo. The Bakopis * small people, here villagers, peasants and Namukadde, the guy who went to England, are making problems for us.

Monday, June 21st

Namukadde is still making trouble. At the meeting, I call upon him and in front of the king, I ask him to listen to the words spoken to him and above all to fulfill them. The king commands him in my presence to give something good: four large banana groves.

Mr. Flaherty talks a lot according to his habit, praises Mackay, says he has a lot of wit, that he will make Mutesa a tank, bridges, canals, a beautiful house. Having said that Musudi was a drunkard, that he did not know Arabic, that he was like a parrot, the ‘Pricked Arab,’ said to him, “Since you boast so much about knowing Arabic, tell me what that means.” and quote a few words to him in Arabic.  Mr. Flaherty, probably not understanding, says he can’t make it right.Then tell it in English to your interpreter “. Mr. Flaherty declines, so in the eyes of the king and his people, Musudi wins. The king said, “If I have so much spirit, it is because I started with “kusomer * kusoma: to read, to study“. I want my people to “kusoma” too.” And immediately, he calls a commander of soldiers and tells him: “Tell your people that I want them to know two things: to kusoma and to handle the gun.” Mr. Flaherty did not understand, so I translated the king’s words to him. I thanked the king. Mr. Flaherty did the same. As he could not stay for a moment without saying anything, the king, wishing to impose silence politely, said to Msudi: “In Arabic, how do you say to someone when you want to say: shut up?” Msudi replied: “We tell him: Eskout.” Mr.Flaherty continuing without noticing the point, the king fortunately adjourned the meeting.

Today we send some letters by Sabatimba who goes with Kambi-Mbaya.

Mardi 21 juin

Tuesday, June 21st

Je pars pour la campagne; je passe prendre le mbaka * mubaka: messager, agent, représentant chez le seigneur de Kikebezi.  Quelques catéchumènes rencontrés sur la route nous accompagnent 10 à 12 kilomètres. Sur la gauche en allant sur le Mtévé. Deux bananeraies, quelques champs de patates; un bel endroit pour le pâturage des bestiaux. Le Nyanza à quelques kilomètres, un joli ruisseau en bas dont les eaux courent en serpentant au milieu de nombreux palmiers sauvages et d’autres arbres de la forêt qui entoure d’un coté le bas de la petite colline que nous devons habiter. Un vent frais qui semble ranimer le sang dans les veines. La vue des nombreuses collines qui se perdent dans le lointain; et surtout l’espérance qu’un jour, tout ce  beau paysage sera animé par des cœurs battant à l’unisson des nôtres pour remercier le Bon Dieu de ses magnifiques beautés qu’il a semées à profusion dans ce pays ….. tout cela nous anime d’un nouveau courage et me fait prier la Providence d’achever son œuvre en faisant de notre petit kialo * village, campagne, exploitation agricole un centre chrétien qui pourra, dans la suite, devenir très prospère, et donner, par son exemple, l’élan aux populations du  Buganda entier.

J’envoie un mot au P.Livinhac pour l’avertir. Dans l’après-midi, le Frère Amans arrive accompagné des enfants avec Lwanga et la femme qui doivent se fixer au kialo.

I leave for the farm; I pick up the mbaka * mubaka: messenger, agent, representative at the Lord of Kikebezi’s.  Some catechumens we meet on the road accompany us during 10 to 12 kilometers. On the left going towards Mtévé. Two banana groves, some potato fields; a beautiful place for grazing cattle. The Nyanza a few kilometers away, a pretty stream below whose waters run meandering among many wild palm trees and other trees of the forest that surrounds on one side the bottom of the small hill that we will inhabit. A fresh wind that seems to revive blood in the veins. The sight of the many hills that are lost in the distance; and above all the hope that one day, all this beautiful landscape will be animated by hearts beating in unison with ours to thank God for his magnificent beauties that he has profusely sown in this country …. all this brings us new courage and makes me pray to Providence to complete his work by making our little kialo * village, countryside, farm a Christian center that will be able, in the future, to become very prosperous, and to give, by his example, the impetus to the populations of the whole Buganda.

I send word to Father Livinhac to inform him. In the afternoon, Brother Amans arrives accompanied by the children, Lwanga and the woman who will settle in the kialo.

Mercredi 22 juin

Wednesday, June 22nd
Les gens du voisinage viennent nous souhaiter la bienvenue. Je retourne le soir à Kibuga. People from the neighbourhood come to say welcome. In the evening, I go back to Kibuga.

Jeudi 23 juin

Thursday, June 23rd
Le Frère revient au kialo. Namulabira est guéri tout-à-fait. Les néophytes l’attribuent à la protection de Dieu. Les pieds de la femme ont été carbonisés jusqu’au-dessus des chevilles par l’ardeur du feu, tandis que ceux de Namulabira ont été atteints un peu seulement à la plante. Pendant qu’on lui rôtissait les pieds, il priait Dieu. Dieu l’a protégé. Le geôlier de Namulabira consent à le laisser se  promener la nuit, à condition que quatre de ses amis restent en otages jusqu’à son retour. C’est ici la coutume, lorsque la sentence se fait longtemps attendre. The Brother returns from the kialo. Namulabira is completely healed . The neophytes attribute it to the protection of God. The woman’s feet were charred to the top of the ankles by the heat of the fire, while the soles only of Namulabira’feet were slightly affected. While his feet were roasted, he prayed to God. God protected him. Namulabira’s jailer agreed to let him walk at night, on condition that four of his friends remained hostage until his return. This is the custom, when the sentence is delayed.

Vendredi 24 juin

Friday June 24th
Le roi a envoyé à Mr.Mackay un certain nombre d’enfants choisis parmi les fils de fundi * artisan pour qu’il leur enseigne à travailler. The king sent Mr.Mackay a number of children chosen from among the sons of fundi * craftsman to teach them working skills.

Samedi 25 juin

Saturday, June 25th
Lettre du P.Girault. Impossible de s’établir à Kaduma. Je vais une seconde fois chez le roi et lui demande 12 mitumbi * mtumbwi: bateau à rames pour aller chercher nos confrères et leurs affaires à Ruoma. Letter from Fr.Girault. Settling in Kaduma proves impossible. I go a second time to the king and ask him 12 mitumbi * mtumbwi: a row boat i to pick up our colleagues and their belongings in Ruoma’s.

Dimanche 26 juin

Sunday, June 26th
Je vais chercher un autre mbaka * mubaka: messager, agent, représentant chez Gabunga. Celui-ci me dit que ce Mbaka est exposé à se faire attaquer avec ses gens, parce que maintenant Ruoma est très mal disposé pour les Baganda; qu’il faut qu’un Blanc y aille ou bien un homme connu de Ruoma * roi d’une contrée au sud du Nyanza . I go to get another mbaka * mubaka: messenger, agent, representative at Gabunga’s. He tells me that this Mbaka and his people are at risk of being attacked, because now Ruoma is very ill-disposed for the Baganda; that a White must go there or a man known by Ruoma * king of a region south of Nyanza .

Lundi 27 juin

Monday, June 27th
Visite au roi; je lui parle des inquiétudes que nous avons par rapport aux dispositions de Ruoma. Le roi dit qu’on envoie trois barques pour s’assurer des bonnes ou mauvaises dispositions de Ruoma. S’il laissait aller les Pères, les barques qui transportent Kambi-Mbaya à Kaduma, prendraient les Pères et leur mali * biens, marchandises au retour. Si Ruoma refusait, les barques reviendraient immédiatement prévenir et l’on aviserait. Visit to the king; I tell him of the concerns we have regarding the dispositions of Ruoma. The king says he is sending three boats to check on Ruoma’s good or bad disposition. If he would let the Fathers go, the boats carrying Kambi-Mbaya to Kaduma would take the Fathers and their mali * belongings, goods on the return. If Ruoma refused, the boats would come back immediately and we would advise.
   

Δ

Juillet Août Septembre 1881 – pp. 264-265

Vendredi 1er juillet

Friday, July 1st
Visite au roi; il me fait de grands compliments, me dit que j’ai beaucoup d’esprit… etc… Il se fait faire des remèdes par un Arabe, Ahmed, lequel en même temps lui écrit des amulettes. Visit to the king; he gives me great compliments, tells me that I have a lot of spirit… etc… He is made remedies by an Arab, Ahmed, who at the same time writes him amulets.

Samedi 2 juillet

Saturday, July 2nd
Je rencontre Mr.Flaherty chez le roi. Il parle toute la séance. Il demande des lusuku * jardin, où on cultive de la nourriture proches de chez lui pour les jeunes ouvriers de Mr.Mackay. Sangola va avec sa dawa * dhow : bateau à voile latine chercher les “kiuma * fer, métal, outil, machine” des Anglais restés à Kuduma. Après la séance, discussion avec  Namukadde, celui qui a été en Angleterre. Il a beaucoup de crainte que nous finissions par manger une partie de ses terres. Katikiro * Premier Ministre donne un mbaka pour aller constater si réellement on nous a donné quatre rusuku * lusuku : jardin, où on cultive de la nourriture . I meet Mr. Flaherty at the King’s. He speaks all the time. He asked for lusuku * jardin, où on cultive de la nourriture , nearby his place, for the young workers of Mr.Mackay. Sangola goes with his dawa * dhow: Latin sailing boat to look for the “kiuma * iron, metal, tool, machine” of the English who remained in Kuduma. After the session, discussion with Namukadde, who went to England. He is very concerned that we will end up eating some of his land. Katikiro * Prime Minister gives us a mbaka to see if we have actually been given four rusuku * lusuku: jardin, où on cultive de la nourriture .

Dimanche 3 juillet

Sunday, July 3rd
Le mbaka envoyé par Kabonga ne peut trouver de barques. Je retourne au Mbuga et une troisième fois, j’obtiens un mbaka pour chercher des barques. The mbaka sent by Kabonga cannot find boats. I go back to the Mbuga and for a third time, I get another mbaka to look for boats.

Mercredi 6 juillet

Wednesday, July 6th
Visite au roi. Mr. Flaherty traite les Arabes de perroquets; discussion avec eux, avec le roi. Mr.Flaherty ayant frappé en entrant aux portes un Arabe, celui-ci veut riposter. Le ministre est obligé d’intervenir. M.Flaherty toujours importun par sa loquacité. Visit to the King. Mr. Flaherty calls the Arabs parrots; discussion with them, with the King. Mr. Flaherty punched an Arab  at the door and the latter wanted to retaliate. The minister had to intervene. Mr.Flaherty’s loquacity is always annoying.

Dimanche 10 juillet

Sunday, July 10th

Partis mardi dernier pour le kialo, nous sommes revenus, le Frère Amans et moi, hier avec six enfants. Le Frère a envoyé dix palmiers pour faire les piliers d’une petite maison que nous voulons faire. Nous sommes convenus avec des voisins qu’ils feront la maison et la clôture pour 4,000 simbis * cauris .

En rentrant, j’apprends que monsieur Flaherty dans la séance de vendredi a parlé au roi avec beaucoup de hardiesse et même de témérité disant que Mutésa n’était pas plus qu’une paille qu’un souffle peut emporter; qu’avec cent Anglais, il se chargeait de s’emparer de tout le Buganda. Le roi en entendant ces paroles, a appelé ses hommes aux armes. Aussitôt le ministre Ssekiboobo * Chef du Bulemezi et les autres guerriers sont venus protester de leur dévouement disant qu’ils sont prêts à mourir pour défendre le roi. Ssekiboobo saisissant deux lances dit: “Puisqu’avec cent hommes, le Mzugu * muzungu: l'Etranger, le Blanc peut s’emparer de tout le Buganda, qu’il prenne maintenant une lance et moi une autre et qu’il commence par se mesurer avec  moi seul. Tous, des plus grands jusqu’aux plus petits imitèrent Ssekiboobo. L’Anglais restait impassible et disait: “Qu’est-ce que tout cela? Un  canon en aurait vite raison. Tu as beaucoup d’hommes dévoués, c’est vrai mais le magezi * sagesse, malice, ruse fait plus que tout cela. Maintenant de tous côtés, les gens disent que le Mzungu * Européen a insulté Kabaka, qu’il veut s’emparer du pays.

 Aujourd’hui, le mbaka parti pour amener les Pères de Ruoma ne pouvant pas obtenir de barques, je retourne encore une fois chez le roi pour demander qu’on accorde les mitumbis * mtumbwi: bateau à rames . Le roi en arrivant me dit: “Nous avons eu discussion avec Filippo. Il prétend qu’avec dix Anglais il peut s’emparer de tout le Buganda.” Je lui réponds que non. ” Le Mzungu ne le peut certainement pas.” C’est une insulte. ajoute le roi. Je l’ai laissé dire car si les Baganda m’avaient vu en colère contre lui, ils eussent pu lui faire un mauvais parti. C’est le mgeni * visiteur, hôte étranger qui a ramené mes hommes d’Angleterre; je veux qu’il soit respecté chez-moi. Il a tort cependant de dire que je suis un sauvage et de se moquer de ce que je ne suis pas aussi riche que les Mzungu. Si je me portais bien et que je puisse aller voir la Queen, ce ne serait pas pour l’insulter.” Les Arabes lui disent que s’il eût osé dire la moitié de ce qu’il  avait dit à Makaranga, roi d’Ousoui, il lui eût certainement fait couper la tête. Apprenant alors qu’à sa rentrée chez lui, Mr.Flaherty avait été pris  d’une très forte fièvre, le roi dit: “Puisqu’il est malade, je vais envoyer immédiatement pour m’informer de sa santé et lui porter le bonjour.”

Brother Amans and I, whi had left last Tuesday for the kialo, returned yesterday with six children. The Brother sent ten palm trees to make the pillars of a small house that we intend to build. We have agreed with neighbors that they will be paid 4,000 simbis * cauris to make the house and fence .

On returning, I learned that Mr.Flaherty in the Friday session spoke to the king with extreme boldness saying that Mutesa was no more than a straw that a breath could carry; that with a hundred Englishmen, he claimed taking over the whole of Buganda. When the king heard these words, he called his men to arms. Immediately Minister Ssekiboobo * Chief of Bulemezi and the other warriors came to protest their dedication saying that they are ready to die to defend the king. Ssekiboobo grabbing two spears said: “Since with a hundred men the Mzugu * muzungu: the White man can take over the whole of Buganda, let him now take one spear and I another and let him begin to measure himself with me alone. All of them, from the greatest to the smallest, imitated Ssekiboobo. The Englishman remained undounted and said: “What is all this? A cannon would soon scatter it. You have many dedicated men, it’s true, but the magezi * wisdom, malice, ruse does more than that. Now everywhere, people are saying that the Mzungu * European insulted Kabaka, that he wants to seize the country.

Today, as the mbaka who had gone to bring the Fathers from Ruoma was not able to get boats, I go back again to the king to ask that mitumbis * mtumbwi: bateau à rames be granted. The king came to me and said, “We had a discussion with Filippo. He claims that with ten Englishmen he can take over the whole of Buganda.” I say no. “The Mzungu certainly cannot.” “It is an insult. adds the king. I did not react because if the Baganda had seen me angry with him, they could have made a bad match for him. He is the mgeni * visitor, foreign host who brought my men back from England; I want him respected at my place. He is wrong, however, to say that I am a savage and to laugh at me because I am not as rich as the Mzungu. If I was well and could go to the Queen, it would not be to insult her.” The Arabs tell him that if Fl. had dared to say half of what he had said to Makaranga, king of Ousoui, he would certainly have had his head cut off. Upon learning that on his return home, Mr.Flaherty had been taken by a very high fever, the king said: “Since he is ill, I will send immediately to inform myself of his health and to greet him.”

Mardi 12 juillet

Tuesday, July 12th

Le P.Livinhac chez le roi rencontre monsieur Flaherty.

Celui-ci ne comprenant pas les objections des Arabes, ne peut leur répondre. Visite du Mulangira * prince, fils de roi Mwanga. Il est tout joyeux d’entrer  chez nous. Nous lui donnons un mouchoir de leso. Mwanga est généralement aimé des Baganda. C’est un de ceux qui ont le plus de chance de … (succéder à Mutesa)

Fr.Livinhac met Mr.Flaherty at the king’s.

The latter, not understanding the objections of the Arabs, can not answer them. Visit of the Mulangira * prince, son of a king Mwanga. He is very joyful to enter our home. We give him a handkerchief of leso. Mwanga is generally loved by the Baganda. He is one of the most likely to … (succeed Mutesa)

Dimanche 24 juillet

Sunday, July 24th
[Le domestique d’O’Flaherty (importé) le quitte, se plaignant des coups qu’il a reçus.] [O’Flaherty’s servant (imported) leaves the job, complaining of being beaten.]

Jeudi 4 août

Thursday, August 4th
[Tous les ânes sont chassés, sur les conseils de Namasole * reine mère du Kabaka . Une ruse de Mutesa pour s’emparer de celui de O’Flaherty. Il prétend que c’est Lourdel qui le demande.] [All donkeys are hunted, on the advice of Namasole * Queen mother of Kabaka . A ruse by Mutesa to grab O’Flaherty’s one. He claims Lourdel requested it. ]

Vendredi 12 août

Friday, August 12th
[Les Anglais vendent leur Evangile en kiswahili. St Matthieu ou St Jean : 1 chèvre ou 20 matoke * (régime de) bananes vertes . Abécédaire : 2 matoke la feuille.] [The English sell their Gospel in Kiswahili. St Matthieu or St Jean: 1 goat or 20 matoke * (stem of) green bananas  . Alphabet primer: 2 matoke per sheet. ]

Lundi 12 septembre

Monday, September 12th
[Un Arabe :] « Pourquoi nous attaquer ainsi hier ? Vous autres Français vous achetez des esclaves, nous ne vous en voulons pas. » [An Arab:] “Why attack us like this yesterday? You French buy slaves, we don’t blame you.”

Mercredi 14 septembre

Wednesday, September 14th
[O’Flaherty veux vendre 2 dotis * dhoti : pièce de tissus d'environ 4m - mesure indienne de tulle pour 6 peaux de panthères.
Mutesa :] « L’Arabe avait raison de dire que parmi les mzungus, il y a des trompeurs. »
[O’Flaherty wants to sell 2 dotis * dhoti: fabric piece about 4m - Indian measure of tulle for 6 leopard skins.
Mutesa:] “The Arab was right to say that among the mzungus some are dishonest.”

Lundi 19 septembre

Monday, September 19th
[O’Flaherty donne une leçon d’exercice militaire aux soldats, la tête couverte d’une simple calotte. Il dit à Mutesa que les Arabes l’encerclent et qu’ils veulent prendre le Buganda. Mutesa :] « Procurez-moi des fusils, des canons, de la poudre. » [O’Flaherty gives soldiers a lesson in military practice with a simple cap over his head. He tells Mutesa that the Arabs are circling him and that they want to take Buganda. Mutesa:] “Get me rifles, guns, powder.”

Samedi 24 septembre

Saturday, September 24th
[Mutesa :] « Pourquoi tous les Blancs qui sont venus ici n’ont-ils pas appris à mes gens aucun métier, aucun art ? » Lourdel propose d’envoyer des jeunes à l’extérieur, certain que Mutesa refusera. [Mutesa:] “Why didn’t all the White people who came here ever teach my people no skill, no handicraft ?” Lourdel proposes to send young people abroad, being certain that Mutesa will refuse.

Lundi 26 septembre

Monday, September 26th
[O’Flaherty chez le roi promet de faire des mines pour chercher le métal, fer, argent, cuivre, … Il s’engage aussi à faire une maison.] [At the king’s, O’Flaherty promises to make mines to look for metal, iron, silver, copper, … He also promises to make a house.]

Δ

Décembre 1881 – pp. 297-298

Lundi 6 décembre (suite)

Monday, December 6th

… arrive le soir du vendredi au Kibuga * Mbuga: le Palais.

Nous avons aujourd’hui fait le cadeau au roi qui a paru satisfait de la carabine Lefaucheux.

Un jeune catéchumène * Mutagwanya, ami d’enfance de Charles Lwanga , page du roi, dont celui-ci se sert pour satisfaire ses infâmes passions, vient tout honteux nous demander comment il pourra se tirer de cette mauvaise situation. S’il  refusait, ce serait pour lui un cas de mort. Le pauvre sent les remords de sa conscience. Après lui avoir conseillé de continuer à bien prier Dieu, ne sachant quel parti prendre, réflexion faite, je lui frotte la figure avec de l’huile de croton * résidu du suif de porc ou de boeuf. Le roi lorsqu’il reverra son chéri après l’éruption des boutons, le croira malade et s’en dégoûtera: c’est l’effet que le pauvre enfant espère. Le roi a donné à cet enfant un gardien comme il en donne à ses femmes de choix afin qu’il n’aille pas avec d’autres. Un autre catéchumène est dans la même position que le précédent.

… arrived on Friday evening at the Kibuga * Mbuga: the Palace.

Today we presented the gift to the king. He seemed satisfied with the Lefaucheux rifle.

A young catechumen * Mutagwanya, childhood friend of Charles Lwanga , the king’s page, whom he uses to satisfy his infamous passions, comes, He is ashamed to ask how he can get out of this mess. If he refuses, it would be a case of death for him. The poor feels the remorse of his conscience. First, we advise him to continue to pray God, not knowing what to do, After reflection, I rub his face with oil of croton * . The king, when he sees his darling again after the rash of the pimples, will think him ill and get disgusted: this is the effect that the poor child hopes. The king gave this child a guardian as he gives to his chosen wives so that he would not go with others. Another catechumen is in the same position as the previous one.

Mardi 7 décembre

Tuesday, December 7th
Le P.Girault porte un petit présent au ministre. Fr.Girault brings a small present to the Minister.

Mercredi 8 décembre

Wednesday, December 8th
Immaculée Conception. Fête, pas de travail. Les PP. Livinhac et Girault vont rendre visite aux Anglais. Immaculate Conception. Holiday, no work. FFrs. Livinhac and Girault go and visit the English.

Jeudi 9 décembre

Thursday, December 9th
On dit que le roi doit envoyer un espion chez les Anglais, qui sous prétexte de kusomer * kusoma: lire, étudier , est chargé de voir ceux qui vont s’instruire chez eux et d’examiner si ces messieurs ne font pas quelque préparatif de guerre. The rumor goes that the king might send a spy to the English’s. Under the pretext of kusoming * kusoma: to read, to study , he is charged to see those who get instructed at their place and to examine whether these gentlemen do any preparation for war.

Vendredi 10 décembre

Friday, December 10th
Mr.Flaherty a, paraît-il, promis la fille de la reine d’Angleterre en mariage au roi Mutésa. Le roi tout joyeux, a donné au farceur deux vaches, du pombé * bière de céréales et une bananeraie. Les Blancs passeront encore une fois pour des menteurs, mais qu’importe à Mr. Fl. Retourné en Angleterre il se sera donné de l’importance, c’est ce qu’il veut. Mr.Flaherty apparently promised the Queen of England’s daughter in marriage to King Mutesa. The cheerful king gave the stuffer two cows, pombe * cereal beer and a banana grove. We White people will once again be seen as liars, but it doesn’t matter to Mr. Fl. Back in England he will have given himself importance, that’s what he wants.

Dimanche 12 décembre

Sunday, December 12th

Mr.Fl. chez le roi est forcé d’avouer honteusement qu’il a menti samedi dernier. Quelle inconséquence de dire de telles choses si sottes à ces pauvres gens qui ne comprennent pas la plaisanterie si on met le moindre sérieux dans ses paroles. Le pauvre Mutesa qui se croyait à la veille de devenir le gendre de sa Majesté Britannique, lui impotent comme il est.

Le P.Girault commence sa retraite.

At the king’s, Mr.Fl. is forced to confess shamefully that he lied last Saturday. How inconsequential to say such foolish things to these poor people who do not understand the joke if one puts the slightest seriousness in one’s words. Poor Mutesa, who thought he was about to become the son-in-law of Her British Majesty, impotent him as he is.

P.Girault begins his retreat.

Mardi 14 décembre

Tuesday, December 14th
Marie, un des rachetés est saisi par Babeker. Celul-ci le réclame comme lui appartenant.  et lui ayant été volé par Mkuma Mfuzi qui l’a vendu chez nous. Marie, one of our redeemed, is seized by Babeker. This one claims that he belongs to him, having been stolen by Mkuma Mfuzi who sold him to us.

Mercredi 15 décembre

Wednesday, December 15th
J’apprends que Mr.Fl. s’est fait donner deux coups de bâton par Namkadde à propos d’un rusuku * jardin, où on cultive de la nourriture     que tous deux prétendent être autorisés à posséder. I hear Mr.Fl. was dealt two blows with a stick byNamkadde about a rusuku * garden, where food is grown that both claim to be theirs rightfully.

Jeudi 16 décembre

Thursday, December 16th
Mr.Fl. toujours occupé avec son msango, vient nous voir dans l’après-midi. Le roi avait réellement envoyé un espion chez eux. Personne ne va plus prier chez eux. Mr.Fl. still busy with his msango, comes to see us in the afternoon. The king had actually sent a spy to their home. No one’s going to pray at theirs anymore.

Vendredi 17 décembre

Friday, December 17th

Mr. Fl. qui vient nous voir, nous dit qu’on lui a volé une partie de ses habits, de la poudre, du plomb, etc…

La maison que nous voulons faire en terre s’avance peu à peu.

Mr. Fl. who comes to see us, tells us that he has been robbed of some of his clothes, powder, lead, etc…

The earthen house we want to make is slowly taking shape.

Dimanche 19 décembre

Sunday, December 19th

Un catéchumène, Buleya, arrive le soir disant qu’on vient de saisir son père et qu’on le recherche actuellement lui et les autres frères pour les brûler tous ensemble La cause de cela est qu’une de  leurs sœurs ayant foumbé * kufumba : préparer le repas, cuisiner (pour qqun) la mère du roi, est accusée d’avoir voulu l’empoisonner, parce que Mutesa, après en avoir mangé, a vomi. Mutesa avait d’abord acquitté le père de la prétendue coupable et s’était contenté de livrer celle-ci entre les mains de la Namasole * reine-mère du Kabaka . Mais Namasole a demandé qu’on lui livrât toute la famille pour la faire rôtir. Mutesa accéda à la demande de sa mère et a ordonné d’arrêter le père et les enfants.

Buleya étant persuadé qu’il va être mis à mort, vient nous supplier de lui donner le baptême, afin que si son corps doit être brûlé sur cette terre il ne soit pas ensuite exposé de brûler corps et âme pendant l’éternité. On a d’abord hésité d’accéder à sa demande, pensant que peut-être, il serait pardonné. Mais ne voulant cependant pas que par la faute des Missionnaires une âme fût perdue pour l’éternité, en cas où on l’exécuterait ….

 

Buleya, a catechumen, arrives in the evening saying that they have just seized his father and that they are currently looking for him and his other brothers to burn them all together. the cause of it being that one of their sisters who fumbed * kufumba: prepare the meal, cook (for someone) the king’s mother is accused of attempting to poison her. Because Mutesa, after eating it, vomited. Mutesa had initially acquitted the father of the alleged culprit and merely delivered her to the Namasole * queen mother of the Kabaka . But Namasole asked for the whole family to be handed over to be roasted. Mutesa agreed to his mother’s request and ordered the arrest of the father and children.

Buleya strongly believing that he will be put to death, comes to beg us to give him baptism, so that if his body is to be burned on this earth, he will not then be exposed to burn body and soul for eternity. We initially hesitated to grant his request, thinking that perhaps he would be forgiven. Howaver, not wanting that, through the fault of the Missionaries, a soul would be lost for eternity, in case he were executed ….

   

Δ

 

 

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